Battements d’ailes effrénés et tapageurs du côté de la mare, ripages et glissements précipités, éclaboussures et grandes gifles d’eau de tous côtés, cancanements appuyés et terrifiés… coin coin, coin, couinkcouink, couinkcouink !! Fuite éperdue et bruyante : trois rutilants cols verts en panique absolue…

— Ouf ! Il s’en est fallu d’une plume que nous ne soyons cuits et grillés comme des poulets malfaisants ! Brrr J’en tremble encore. Drôles d’humains tout de même. Toujours un fusil sur la langue ou au bout des bras !! Comme s’ils ne savaient défendre leurs positions qu’à coups de fusil ! Nous ne faisions que notre travail pourtant, n’étions ni agressifs ni menaçants.

— Oui, bougres d’humains ! Engagez-vous donc et rejoignez ou créez un syndicat. Rien de moins sûr et de plus risqué, croyez-en ma courte expérience. Pas toujours les bienvenus, tant s’en faut. Foie de canard !!

— Le foie, voilà bien le problème justement, moins le nôtre d’ailleurs que celui de nos congénères, mulards et de Barbarie. C’est pour eux que nous avons rejoint la SCV, le syndicat des cols verts, défenseurs de la cause des anatidés, canards et oies. Une bonne cause, ceci dit, mais oh combien périlleuse !

— Une cause perdue tu veux dire ? Faire du gras : une tradition ancestrale trop bien ancrée dans les esprits. Se passer de quelques pâtés insipides ; à la rigueur. Mais de foie gras, rillettes de canard ou d’oie, pâtés de foie gras, magrets ou confits… Hum miam ! Plus difficile, beaucoup plus difficile ! Qui s’inquiète d’ailleurs du comment ils arrivent dans nos assiettes !

— Pauvres créatures sacrifiées sur l’autel de la gastronomie, gavées, éventrées et étripées pour le plaisir de nombreux amateurs, gourmets et becs fins, ou pas, à travers la France et le monde !

— Comment changer cet état de fait et amener restaurateurs et gastronomes à… un peu moins d’excès, ne serait-ce que cela ?

               Mea culpa, mea culpa, mea maxima culpa ...! J’avoue, j’avoue ne pas rechigner devant un bon toast grillé ou une tranche poêlée de foie gras, un magret au poivre vert… Bien sûr je ne gave ni ne tue ces pauvres bêtes mais savoure avec délice leur chair si délicate, voire la cuisine même parfois ! Sacrilège ?

— Quand je vous disais que nous sommes engagés dans une bataille terriblement délicate et de longue, très longue haleine. Coin !

— Mais une cause qui mérite que l’on se batte tout de même. Coin coin !!

— Allez mes frères, c’est pas tout. Bien gentil de cancaner, mais faut qu’on y aille ; encore beaucoup de clients à convaincre. Non ? Coin coin, coin !!!

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