
Quand tu m’as délaissé
Devant mon verre de rouge
Sans même me prévenir
Qu’ t’en avais assez d’ moi,
De mes drôles d’idées
Et de mes coups de blues,
Je n’ t’ai pas vue partir,
Je ne pensais qu’à moi.
Des fois il faut s’ méfier
Du petit verre de rose
Qui te fait déguerpir
Sur des chemins sans loi,
Des routes égarées
Où on croit que l’on ose
Sans même réfléchir
Qu’il y a des dernières fois.
On m’a dit qu’on t’a aperçue
Du côté d’ la rue Saint-Vincent
Au bras d’un poète inconnu
Qui te faisait croire aux amants.
J’ai pris le bus à la Bastille,
Celui qui partait de Montrouge,
Regardant toutes les belles filles
En imaginant sous leurs blouses.
Arrivé juste avant la nuit,
Tu sais, la nuit qui fait rêver,
J’ai cru que c’était aujourd’hui
Qu’on refaisait notre flambée.
Mais ne te trouvant pas
J’ai réfléchi
Mais oui c’est sûr, elle fait un tour
Côté Mada, côté tout noir.
Du poète et des troubadours,
Elle n’a retenu que l’espoir.
Du coup, j’ai rattrapé l’étoile,
Qui brille belle en Utopie,
Quelques mots dits pendant l’escale
Et je me croyais recompris.
C’était sans compter que la vie
S’amuse souvent des délires
De tous ceux qui n’ont rien compris
Et se croient au-dessus des rires.
MADAGASCAR
Même ici, le p’tit rose
Qu’est souvent qu’un p’tit rhum
Te renvoie aux églises
Des sans foi ni emploi.
J’ai beau faire de la prose,
M’inventer des diplômes,
Ils se marrent et se grisent
Ils s’ moquent même pas de moi.
Dans la même galère
Des paumés, des largués,
On voudrait bien y croire
A la chance qui pass’ra,
On n’est même plus colère,
On sait juste ricaner,
On s’ raconte nos histoires
De descente tout en bas.
Je crois que c’est le vent maraud
Qui m’a soufflé la solution :
Va voir du côté de la faune,
Y a p’ t’être quelqu’une qu’a des souv’nirs…
J’ai pris mon sac et mon chapeau,
Mes provisions de séduction,
Une carte de l’Amazone
Et des idées pour lui écrire.
Hello, c’est toi ? c’est moi ! c’est nous ?
Pas nous, seul’ment les deux d’hier.
J’avais vraiment mon air de fou,
Sûr’ment l’envie qu’elle me préfère.
AMAZONE
Amazone ou Mada,
Je crois que j’ai rempli
Le fleuve et les rizières
D’eau salée, de sale eau
Et j’n’avais encore pas
Bu tout jusqu’à la lie
L’hallali c’est calvaire
Pour les hommes en lambeaux.
Encore une fois le verre
Rose ou rouge folie
Partagé près du fleuve
Les yeux dans l’avenir
Me déchire les viscères.
Je hurle mes défis
Je crois aux idées neuves
Et je veux te voir rire.
T’as quitté les forêts du monde
En me laissant exsangue et saoul
Sous les palm’s de l’arbre voyage
Et je sais que tu es partie.
Je reste là où l’ rouge abonde
Avec mes rêves autour du cou
Mais toi tu as quitté la cage,
Où me mènera ton oubli ?
Tu pourrais aller sur la lune
Chercher un autre ami Pierrot,
Je trouverais une fortune
Pour t’emmener sur mon vaisseau
JAPON
Qu’est-ce que tu fais chez eux ?
J’n’ai pas compris ta route,
J’t’attendais près d’ailleurs
Plutôt côté j’m’évade
Plutôt dans la banlieue.
Toujours à ton écoute,
J’m’étais habillé l’ cœur
Pour vivre ma croisade.
Croisé des mal-aimants,
Mal aimé des systèmes,
L’armure pleine d’épines,
L’espoir en bandoulière,
Je cherchais mon pendant,
Celle qui me dit je t’aime,
Celle qui me devine
Et m’emporte en mystère.
Saké pays très mystérieux
Pas d’ rhum mais toujours de l’alcool
Qui partout te délie la langue.
J’interrogeais, je te cherchais
Et souvent c’est le silencieux
Qui d’un clin d’œil à la boussole
Et la tête qui dit, qui tangue
M’envoie visiter les palais.
De la soierie, des kimonos.
Je trouvais toujours un bonheur,
Pour toi rien n’était assez beau ;
Je te gardais les sons d’ mon cœur.
Italie
J’ai cru au rendez-vous
Que tu avais fixé
À ceux d’ la cantonade
En leur parlant chianti.
Non, je n’ suis pas jaloux,
Mais j’les vois arriver
Bel canto, sérénade
Et arrivederci.
Un petit air joyeux
M’avait fait espérer
La rencontre possible
Avec ton indulgence.
À jouer avec le feu,
Faut s’attendre à s’ brûler
Avec l’incompatible
Avec l’incohérence.
C’est à ta botte que je suis
Sous ton joug, guettant tes désirs ;
Je suis prêt à tout oublier
Hormis nos jeux et nos promesses,
Je te promets, je te choisis,
J’oublie l’alcool, j’oublie d’écrire
Je serais prêt à m’immoler
Je te fais don de ma faiblesse.
Rires pour toi, pour moi les larmes,
T’as sûrement trouvé ton histoire,
Tu le sais, j’ai rendu les armes
Mais je n’ cesserai pas d’y croire.
SALVADOR
Salvador, c’est l’espoir
Qui a chassé mes peurs
Samba et candomblé
T’emportaient vers la vie.
Et c’est sûr’ment ce noir
De toutes les couleurs
Qui du crème au café
Chassa ma jalousie.
Quand on croit le vaudou,
Ogoun et Iemanja,
On sait qu’un petit vœu
C’est plus qu’une prière.
J’ai dansé comme un fou,
Chanté mon nirvana,
Imploré mes aïeux
Et déclaré ma guerre.
RETOUR
Tu n’avais plus aucune raison
De ne pas entendre mes cris
Mes sanglots et tous mes poèmes
Et les mots dits et tant aimés.
J’avais inventé la chanson
Qui dit tout : amour et folie
Mais ne sais pas dire je t’aime
Avec des mots à déguster.
Je t’avais donné rendez-vous
Dans un endroit que tu connais
Et je me disais après coup
Qu’ c’était bien quand je t’appelais.
Quand on s’est retrouvés
Devant ce verre de rose
Sans même savoir se dire
Un p’tit bout d’ nos émois,
Ma main s’est approchée
Pour te dire quelque chose,
Je crois que tu vas rire :
C’est toi ? C’est moi ?
C’est bon d’ pas réfléchir,
Juste de regarder,
T’es là ?, t’es vraiment là ?
Vas-y, fais-moi ton rire
Cherche pas à penser
Je prends comme une offrande
Tes yeux qui sont pour moi.
Du côté d’ la rue saint –Vincent,
On s’est prom’nés bras d’sous, bras d’sus,
On y croyait aux deux amants
Qui s’étaient un p’tit peu perdus
Et j’ai pensé que maintenant
Que ton poète pas très connu
Te devait peut-être un serment :
Plus jamais tu n’ seras perdue.
