Du temps
Rien que du temps
C’est pas grand-chose du temps perdu
une peccadille qui passe
l’horizon
fut brossé de foudre puis d’accalmies
mais aux quatre flancs du printemps
rien n’évoquait désormais les restes d’automne
ces feuilles mortes sur la peau
que l’hiver n’avait pas balayées
printemps beau bleu ocre et turquoise
qui jette les fleurs comme des pagnes sur l’humus
émaillé d’émeraude fine
noir aussi de quelques doigts de branches mortes
définitives émergeant des feuillages
printemps chapelle aux clartés mouvantes
et si lumineuse douche de verdure adoucie
reluisant dans l’ombre étalée
les soleils chaque jour sont moins obliques
les pas usés m’ont conduit
jusqu’au blottissement du très long tourment
c’est là que je voulais reposer en t’attendant
resteront gravées les rayures
dans ce corps alourdi
que je n’accepte plus de reconnaître
et ce que j’en subis en ton absence
quand les mains deviennent mauves
signifie clairement que le froid a trouvé en moi le refuge qu’il cherchait
printemps nouveau
chapelle pénétrante
où l’air se poudre
de bien davantage intérieur
par-delà les mines statufiées
aux croûtes de bois
pierres enfumées ou toiles sombres
il y a du sacré dans la poussière
douze stations de supplice
aux quatre coins
maltraitant tout regard attentif
prends mon silence pour un je t’aime de permanence
prends mon regard comme une coque
qui t’épargne les méduses des méchants
prends mes mains pour des embouchures à vie
prends mes gestes comme un décor à ton élégance
prends tout ce que je fais
tout ce que je suis
tout ce que je pense
je ne me perds jamais
je sais
je me trouve
le cœur a bien raison
Commentaires
Magnifique poésie aux multiples facettes.
Plusieurs passages m'ont touchée plus spécialement:
"les pas usés m'ont conduit jusqu'au blottissement du très long tourment…"
et à partir de "il y a du sacré dans la poussière", les sublimes injonctions "prends mon silence…prends mon regard…prends mes mains…". Merveilleuse déclaration d'amour.
Du grand art !