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Une musique, un texte : ICI

Il avançait sous les frondaisons. Le temps était légèrement couvert. Pourtant il n’allait pas vraiment pleuvoir. Juste comme l’aile d’une nostalgie qui effleure et laisse aller un peu plus loin.

Il marchait...

Autrefois, il avait su que la nature était belle à pleurer. Mais c’était autrefois, c’était avant... Avant quoi ? Il ne savait plus... Avant que l’insouciance ne s’éloigne. S’éloigne et s’estompe sans faire de bruit dans le brouillard de ses pensées... Ses pas d’automate s’enfonçaient dans le moelleux du temps.

Il marchait...

Elle devait pourtant être aussi belle qu’avant cette nature qui ne lui parlait plus, qui ne le regardait plus, qui respirait sans lui. Lui ne respirait plus.

Il marchait...

Il marchait vers un ailleurs. Pourquoi ?... Personne. Pas le moindre écho à son silence. Pas même un clin d’œil qui l’incite à réclamer son dû. Ce désastre. Cette injustice. Cette injustice devait être juste puisqu’il n’y avait pas le moindre murmure de protestation. Tout était parfait. Tout vivait parfaitement juste à côté. À côté de lui. Sans lui. De l’autre côté de ce mur en verre si mince, invulnérable.

Il marchait...

Il avançait dans le décor de sa vie. Il avançait dans une vie. Et toujours l’horizon qui s’éloigne...

Là-bas le ciel s’éclaircissait. Un peu plus de bleu, un peu plus de lumière. C’était là-bas.

Il marchait...

Là-bas les arbres étaient plus verts. C’était là-bas. Il marchait... Là-bas les oiseaux criaient leur joie de vivre. C’était là-bas. Et toujours l’horizon qui s’éloigne dans ce jeu de miroirs infinis. Dans sa bouche grande ouverte, c’est la prière de l’incroyant. Elle hurle sans un bruit. Pourquoi ? Mais pourquoi ?...

 

Il marche, mais ne le sait plus...

 

nouvelle libre audio: 
Roberto Fonseca

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Commentaires

barzoï (manquant)
Il marchait.

Et il y a ces fameux passages dans la vie où on l’on est plus qu’un fonctionnement qui fonctionne et il y a aussi cette étrange étrangeté de ce sentir à côté d’autres qui fonctionnent, un sentiment de mal-être profond et inhérent : « tout vivait parfaitement juste à côté », « il avançait dans le décor de sa vie, il avançait dans sa vie et toujours l » horizon qui s" éloigne", » l’horizon qui s’éloigne dans ce jeu de miroir infini", « là-bas ».

L’indicible est dit, un passage en force de la sensibilité, merci A.nonyme d’écrire ce genre de choses et bravo pour oser et pour le courage. Quant au style, il va comme un gant.

plume bernache
aile de la poésie

 

 

 

" l'aile d'une nostalgie qui effleure et laisse aller plus loin"
Dès les premières mesures  le ton est donné; l'aile de la poésie m'a effleurée

En lisant ce texte, je pense à une allégorie du "Paradis perdu".angel

 

"cette injustice devait être juste puisqu 'il n'y avait pas le moindre murmure de protestation"  Amorce du sentiment de culpabilité ?

"la prière de l'incroyant" et "elle hurle sans un bruit": encore deux beaux oxymores !

La lecture de ton texte me donne envie de reécouter la musique de Fonseca et vice versa . Cela peut durer…  

 

luluberlu
Portrait de luluberlu
Les instruments sont le

Les instruments sont le véhicule de la pensée... L'écrit aussi. Il n'y a pas que la marche qui aide à avancer dans le décor de la vie (superbe) et s'enfoncer dans le moelleux du temps. Bravo pour cette partition synchrone.

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