— Moi, quand j’étais une maman, j’avais eu un bébé qui était tombé plouf, comme ça, et il avait le nez tout cassé quand une araignée méchante a voulu l’attraper alors j’ai pris une corde pour le tirer…
Le téléphone sonna. Marie dut interrompre le récit qui continua sans elle. Son fils de trois ans, à l’imagination débordante, ne remarqua même pas son absence tant il était captivé par ses souvenirs de réincarnation.
— Oui, je sais, c’est demain. Non ne t’inquiète pas, ça va aller. Oui Lucas va bien. Oui je sais, j’aurais dû. Écoute, laisse-moi gérer ça.
Marie raccrocha. Elle aurait dû. Bien sûr c’est tellement facile à dire. Elle retourna vers Lucas, termina sa toilette et l’emmena se coucher.
— Maman, papa il sait voler dans le ciel comme les oiseaux ?
— Oui, mon chéri.
— Et aussi, c’est un pompier et il éteint les feux et il est très courageux ?
— Oui, mon chéri.
Demain. Demain le pompier aviateur pourrait refaire surface. Elle devait le lui dire.
— Maman, et papa il sait dresser des tigres hein ?
— Oui, mon chéri.
— Et puis aussi il est tellement grand qu’il peut toucher les nuages ?
— Oui, mon chéri.
Demain. Demain, le dompteur nébuleux pourrait venir frapper à leur porte. Elle devait le prévenir.
— Maman, et papa il sait jeter des sorts comme les fées ?
— Oui, mon chéri.
— Et puis aussi, il sait faire de la moto très très vite ?
— Oui, mon chéri.
Demain. Demain, ce sorcier inconséquent pourrait revenir saccager sa vie. Elle devait le protéger.
— Maman, et papa, il sait grimper aux murs comme les araignées ?
— Oui, mon chéri.
— Et puis aussi il est le plus fort de la Terre ?
— Oui, mon chéri.
Demain. Demain, ce prédateur brutal pourrait revenir semer la terreur dans leurs vies. Elle devait l’en empêcher.
— Maman, et papa il est si malin qu’il gagne tout le temps ?
—…
Demain cet homme qui l’avait dominée sous les coups pendant des années allait sortir de prison.
— Hein, dis maman, il gagne tout le temps papa ?
— Non, mon chéri.
Commentaires
Bonjour, merci pour vos commentaires.
Le premier paragraphe est difficile à comprendre, je l'ai changé depuis. C'est en fait l'enfant qui raconte une histoire à sa maman, mais le contenu de son récit peut semer une certaine confusion.
Je voyais, pour ma part, beaucoup de tendresse dans les "oui, mon chéri" de cette maman qui submergée par l'angoisse, tente de ne pas dérailler devant son fils et surtout le préserve en approuvant les images suggérées par ce dernier. Il faut une force incroyable pour garder pour soi toute la vérité et ne pas écorcher l'image du père. Je ne rajouterais donc rien dans les dialogues. Elle ne peut pas en dire plus. En revanche, je pourrais ajouter des gestes et des attitudes qui témoigneraient de la douceur de la mère.
Merci à tous pour vos retours !
Eh bien, je ne serai pas aussi tranché que Brume ou Jamijo. J’y vois la réponse machinale d’une maman très préoccupée (inquiète). Inquiétude traduite par les « réflexions » qui émaillent le récit. Exemple :
« Demain. Demain, ce sorcier inconséquent pourrait revenir saccager sa vie. Elle devait le protéger. »
Mais que j’aurai plutôt mises en italique.
Bonjour Escampette,
J'ai beau lire et relire, je n'accroche pas à la lecture de ce récit. La mère témoigne d'une telle froideur en répondant aux questions de son fils. Même si on la devine tellement préoccupée par le retour du père le lendemain, on ne se sent pas concerné par le sujet. Par contre, ce que dit l'enfant montre bien l'admiration sans bornes du fils pour un père absent. Je rejoins le commentaire de Brume. Cette situation est plausible effectivement, elle ne doit pas être facile à gérer. Merci de nous faire réfléchir à ces dures réalités.
L''hyper sensible parle en douceur de l'indiscible... Merci
Je suis assez mitigée, il y a du bon et du moins bon.
Le début est assez complexe. je ne comprends pas les 2 premiers paragraphes.
Quand la mère raconte à son fils une histoire, je ne comprends pas la projection du gosse "...tant il était captivé par ses souvenirs de réincarnation." C'est quoi le rapport?
Et puis je trouve l'extrait de ce récit trop glauque à raconter à un gamin de 3 ans.
Enfin je suis désolée mais je n'ai pas été touchée.
J'aime la subtilité mais quand elle est alliée avec la fragilité, ce que je ne trouve pas ici. Là je trouve la mère d'une froideur, comme absente, submergée dans ses pensées, ses répliques sont pauvres face aux propos pleine d'innocence de l'enfant. Les "oui mon chéri" sont vraiment redondants.
J'aurais aimé voir un peu plus de complicité, de tendresse entre la mère et son fils.
Sur les passages où la mère est dans ses pensées pendant que son fils lui parle, l'angoisse, la peur, de l'arrivée du père devrait être plus palpable, mais là je ne ressens pas ces sentiments, ce que je veux dire, qualifier un homme brutal de "dompteur nébuleux ou sorcier inconséquent" ce n'est pas très cohérent, bien que je comprends l'envie de révéler la véritable personnalité du mari au fur et à mesure pour contraster entre la vision conte de fée de l'enfant et la réalité, c'est une bonne idée mais ce n'est pas assez étoffée.
En revanche, le parler enfant est pour moi une belle réussite.
Du vécu, ou alors avec des accents d'une pure réalité !
Bravo.
Après relecture, je confirme ma première impression. Je suggére cependant de supprimer le début. Il me semble que cela améliorerait beaucoup le texte, en lui donnant plus de puissance.
