Accueil

 

Encore sonné je déambulais, filigrane parmi des ombres aux contours incertains.

 

« Qu’est-il arrivé ? Qui suis-je ? »

 

Hagard, égaré, j’errais dans les méandres d’une conscience voilée par le niveau des larmes. Les souvenirs du cataclysme se dessinaient en ombres chinoises.

Errant au cœur d’une forêt de fantômes, je finis par pressentir la réalité du drame qui avait tout rasé.

Apeuré, je me tenais reclus au fond de mes idées noires, m’accrochant désespérément à mes douleurs, ultimes symptômes de vie, comme un naufragé est pendu à son rafiot.

 

Deux petits lutins facétieux surgirent, j’assumais, par devoir et avec abnégation, le rôle de ma vie. Puisant dans mes dernières forces, je les suivais.

 

« L’ombre de moi-même suffit-elle à faire illusion ? »

 

Ils s’évanouirent et réapparurent alternativement comme par magie noire. Noir tout était noir, non rien n’était blanc ou noir, tout était noir. Je replongeais dans le labyrinthe de mes frustrations, mes désirs arrachés, mes envies interdites. En cette époque de guerre sanglante je ne trouvais refuge que dans le néant. Peu à peu la vie s’épuisait, comme une bougie chancelante se noie dans sa matière liquéfiée. La lueur toujours plus fragile se diluait dans une nuit opaque.

 

M’enfonçant toujours profondément dans mon hyper conscience comateuse, je finis par trouver mon intime essentiel. L’instinct animal m’interdit d’échapper à la torture par abandon.... ici la vie laissait le champ libre à l’ironique survie...

 

J’acceptais que demain ne fût plus la réalisation des rêves d’hier, je repoussais même les derniers vestiges d’un passé ravagé.

Saisissant du bout des doigts mes dernières volontés, j’ouvris une fenêtre.

Rendu muet, le clavier devint mon paravent et mon porte-parole.

Pour marquer ce que je croyais être une renaissance, je dus me choisir un nom de baptême. J’exhumais un bout de passé antérieur en guise de pseudo.

Mon quotidien était désormais rythmé par mes visites à la fenêtre, d’où je scrutais ce monde dont j’étais, ou, je m’étais exclu.

 

« Pseudo, mon gémeau pseudo, ne vois-tu rien venir ? »

 

Je misais mes derniers espoirs d’être sur un hasard heureux, qui pointerait le bout de son nez, espiègle et entraînant, par l’encadrement.

 

« J’étais à la fenêtre et je vous ai vu :

  • les dingues et les paumés gavés à l’audace du virtuel, gonflés d’égo sans gène

  • mes frères et sœurs d’infortunes nous qui n’avions que nos souvenirs déchus et meurtrissures à partager.

  • Les prédateurs sans empathie, qui jouaient au chat avec les petites souris blessées. »

Le sentier escarpé vers la résurrection était-il vraiment derrière cette fenêtre ?

Je n’osais même plus tendre la main pour voir si une autre la prendrait. Il est des âges où l’on prend du plaisir, ou la main, sans demander la permission à quiconque.

Alors que je dissimulais mes larmes dans l’océan virtuel de ma baignoire, je décidais de monter sur l’appui et de sauter...

Je tombais sur d’autres arrachés à l’humanité, qui avaient, eux, même décidé que la fenêtre serait une porte. Mais faire la part des choses entre illusion, rêves, réalités, volonté forcenée, n’est pas une sinécure.

 

« Elle était à la fenêtre et nous nous sommes vus. »

 

Les jours défilaient en syncopes, à contretemps, les nuits étincelaient de coda, comme des retours vers le futur. Les démons ont commencé leur long et méticuleux travail de sape des impossibles à vivre et des illusions... réelles.

 

« Et si je n’avais pas sauté en marche d’une vie mais de la vie ? Et si la fenêtre n’était qu’un trompe-l’œil ? J’étais à la fenêtre, et, j’ai vu le mur ? »

 

Dans mes pérégrinations erratiques sur les voies des électrons, je découvrais de nouvelles fenêtres. L’ombre d’ici devenait multitâches....

 

L’une de ces ouvertures s’ouvrit sur un faux semblant de vie laborieuse.

 

« Encore une de ces illusions à la Majax, il faut toujours se méfier des Gérard ! »

 

Une autre embrasure ramena à la vie des vestiges. Des amitiés se réanimèrent avec leurs effets désirables.

La réaction en chaîne s’amorça, comme une infection, des foyers de vie essaimèrent.

 

« J’étais à la fenêtre et je vous ai vu... vous aussi ! »

 

Un jour, par l’une de ces lucarnes, filles de celle qui est magique, une main s’est tendue. Je me suis penché pour la saisir, et la voilà qui me fuit.

 

« Ne pas lâcher, la lumière est là, derrière le carreau. »

 

Cramponné à l’espoir d’une main, et à la douleur, signe inéluctable de mon état de vivant, de l’autre, j’entrais en résistance.

La fenêtre se referme, comme une plaie cicatrise, sans double tour, mais la lumière n’y filtre plus.

Le tant espéré d’antan, maintenant inattendu, revient à moi. Une voix surgit de nulle part et me rappelle à la fenêtre.

 

J’y cours....

 

« J’étais à la fenêtre et je vous ai vus, vous, eux, mes lendemains que j’espère,… encore ! »

 

3.54
Votre vote : Aucun(e) Moyenne : 3.5 (2 votes)

Commentaires

chVlu
Portrait de chVlu
merci cat de cet avis et de

merci cat de cet avis et de cette lecture, qui pour une part t'appartient. Bien sûr il y a beaucoup de moi dans ce narrateur mais en même temps par pudeur et par volonté que mon propos est plus de sens que le simple partage d'une expérience j'ai souhaité que le factuel ne soit présent qu'en trame.

"Sans eux, tout aurait pu basculer dans l’irréversible"    il s'agit là de ta lecture pas de mon expérience que je donne en parlant de l'instinct de survie.

"ces portes derrières lesquelles l’on se retranche" mon vécu est là aussi différent, il y a eu un moment ou mon seul lien avec autre chose que du vide passait par la fenêtre.

 

Alors ton commentaire me fait plaisir car il me dit que j'ai au moins réussi à ne pas faire qu'un récit factuel d'une situation personnelle mais bien à suciter une réflexion, partageable, respectant la diversité des ressentis, sur ce que peuvent être ces fenêtres dans une vie.

Sören Kierkegaard (1813-1855), Ce n'est pas le chemin qui est difficile, c'est le difficile qui est le chemin

Cat
La vie par la fenêtre

 

C'est un texte qui ne se laisse pas apprivoiser comme ça.

Les mots sont lâchés par saccades, avec une pudeur où se mêlent la souffrance profonde, l’espoir rafiot et l’aveuglante lucidité.

Lorsque tout devient noir, de ce noir étouffant qui pousse à se jeter dans le vide, surgissent les lutins facétieux qui donnent à jouer le meilleur rôle d’une vie en survie, ou prévaut l’abnégation. C’est un moment charnière. Sans eux, tout aurait pu basculer dans l’irréversible. On le ressent très bien à la lecture. Mais l’on ressent aussi que tout cela n’est pas suffisant pour satisfaire l’existence. Alors il y a ces fenêtres, ces portes derrières lesquelles l’on se retranche, voulant croire à tous prix qu’ainsi faisant on se met à l’abri des déceptions, rêvant malgré tout d’un autre côté meilleur. Et là encore, c’est tout faux ! Les déceptions sont d’un autre ordre, mais elles existent bel et bien et font aussi mal.

C’est la vie moderne sous toutes ses coutures, finalement. Elle est là, avec toutes ses casseroles, et chacun en fait ce qu’il veut, ce qu'il peut...

 

Merci pour le partage, ChVlu.

 

Cat, à sa fenêtre ^^

 

 

chVlu
Portrait de chVlu
merci a tous pour vos

merci a tous pour vos commentaires, retour de ressentis, et pas parfois ;),

 

Ils ont nourri ma réflexion et je vais arriver à une autre version de ce qui est ici publié... Je le porterais en lecture avec l'idée que le chemin parcouru entre les deux états pourra interesser et voir même ouvrir discussion...

 

merci encore à ceux qui se sont déhjà penché sur ce texte.

Sören Kierkegaard (1813-1855), Ce n'est pas le chemin qui est difficile, c'est le difficile qui est le chemin

brume
Portrait de brume
Bonjour,   J'ai lu et encore

Bonjour,

 

J'ai lu et encore relu et malgré le fond intéressant je n'arrive pas à être séduite par l'histoire.

Je pense que cela est dû à la tonalité, l'expression de son mal-être est tellement trop que je l'ai lu comme une parodie. 

Ses sentiments énumérés sont exagérés, et d'ailleurs ils sont trop dits et non suggérés.

Maintenant je me pose la question est-ce ironique ou sincère? j'opterais pour la 1ère.

Le problème est, comme je viens de le dire, c'est que tout est trop dits et pas assez suggérés donc l'atmosphère ne prend pas. Il y a trop d'adjectifs qui énoncent le mal-être et la solitude que ce soit ceux du narrateur ou ceux du monde virtuel. Je sais que nommer les émotions est important pour comprendre l'état d'esprit des personnages, mais là c'est vraiment trop. 

Mais malgré tout j'aime bien le regard que pose le narrateur sur le monde derrière la fenêtre virtuelle, et la fin d'où surgit l'appel à la vraie vie.

 

Louis P.
Comment se sauver en se

Comment se sauver en se jetant par la fenêtre, mais une fenêtre informatique...

 

Un « cataclysme » s'est produit, un « drame », mais on ne sait pas lequel.

Ce drame « a tout rasé » comme une sorte de « guerre violente ».

La vie devient pour le narrateur impossible dans le monde réel, il ne peut qu'y survivre, et cette survie n'est qu'un présent douloureux, le passé se trouve « dévasté », l'avenir ne répondra pas aux attentes. L'avenir est sans espoir.

« Qu'est-il arrivé  ? Qui suis-je ? ». Le narrateur ne sait plus très bien ce qui s'est passé, mais la situation l'a laissé dans le trouble, « sonné », « égaré », dans une perte d'identité.

Il se retrouve dans le « noir », manquant de lucidité, mais aussi solitaire, « exclu » du monde, dans une fermeture sur soi.

 

Le narrateur est alors en recherche d'une « fenêtre » qui l'ouvre sur une extériorité, une fenêtre ouverte sur le monde, qui lui permette d'échapper à la clôture sur soi, de rompre la solitude, de « renaître » à une vie nouvelle, à une identité nouvelle, comme si le drame vécu l'avait tué de l'intérieur, l'avait anéanti.

La fenêtre trouvée, c'est « window », celle que constitue l'écran de l'ordinateur qui ouvre sur le monde dit « virtuel ». Sur Internet est recherché le moyen d'une « résurrection ».

Le narrateur se donne ou se recrée une nouvelle identité dans un « pseudo ».

 

Ce qui se découvre par la fenêtre, et la communication qui s'y établit, n'est pas d'abord réconfortant, et ne permet pas vraiment de revivre.

On communique avec d'autres « dingues et paumés », « d'autres arrachés à l'humanité », parfois des individus narcissiques au moi boursouflé, « gonflés d'ego », mais aussi des « prédateurs ». L'anonymat derrière l' écran autorise toutes sortes d'« audaces » , les prédateurs « jouent au chat avec les petites souris blessées », avec un sur les mots « chat » et « souris » ( souris d'ordinateur et « chat » comme moyen de discussion sur les réseaux informatiques.)

 

On voudrait transformer ces fenêtres en portes.

Toutes deux constituent des ouvertures vers l'extérieur, mais la fenêtre permet seulement de voir, d'observer l'extérieur, elle ne permet pas d'entrer ou de sortir. La fenêtre ne laisse entrer que la lumière, mais la porte permet un passage entre l'intérieur et l'extérieur, une entrée ou une sortie d'un être humain. La fenêtre, percée dans les murs opaques, autorise une communication avec l'extériorité, on peut faire des « signes » à la fenêtre, mais toujours à distance, alors que la porte favorise une communication plus directe et des rencontres, une plus grande proximité, une vie commune sans murs de séparations. Une fenêtre suppose toujours des cloisons qui l'encadrent, des murs de séparation, mais la porte franchie, on est hors les murs.

Les portes ouvrent de nouveau sur la réalité.

 

Malgré les déceptions, le narrateur retrouve une vie à la fenêtre, par laquelle des rencontres ont été possibles et même un travail: « Elle était à la fenêtre et nous nous sommes vus » ; « l'une de ces ouvertures s'ouvrit sur un faux semblant de vie laborieuse » ; « des amitiés se réanimèrent avec leurs effets désirables »...

 

L'avis à la fenêtre devient la vie à la fenêtre.

 

On s'en sort malgré tout par les fenêtres informatiques.

 

 

Un texte intéressant, malgré quelques maladresses de style, et quelques oxymores pas très heureux, par exemple « des illusions réelles », ou "hyper conscience comateuse". Par ailleurs, l'apparition des "lutins" ne sert pas le récit. Qui sont-ils ? Des doubles du narrateur ?

 

 

luluberlu
Portrait de luluberlu
Bon, autant l’écrire : pas du

Bon, autant l’écrire : pas du tout séduit par cette succession de phrases dont les liens ne m’apparaissent pas. La mise en page y contribue également. Comme l’écrit Pepito, « la forme m’a rebutée »... Le fond également. Déjà, quand je lis : « “Qu’est-il arrivé ? Qui suis-je ?” », je ne puis m’empêcher d’ajouter « dans quel état j’erre ». C’est mal barré. Le choix du vocabulaire tutoie le pompeux.

Globalement, c’est, de mon point de vue, un texte à retravailler. Un peut plus de liant, un peut moins de pathos.

Par curiosité (malsaine ?), j’ai passé le texte au répétoscope : fenêtre 12 fois. Finalement, le naufragé, c’est moi, le lecteur. Le rafiot prend l’eau.

Vous voudrez bien, je l’espère, excuser ma franchise (j’ai conscience que mon avis peut paraitre un peut dur). D’un autre côté, ceux de Pepito et K-tas-strof m’apparaissent, comment dire ?... Enfin, vous voyez. J’attends la volée de bois vert (sereinement devil).

 

PS : pompeux n'est pas le mot qui convient. Trop dense, peut-être ? Et donc un peu lourd.

Pepito
"rafiot" arrive juste à temps

"rafiot" arrive juste à temps pour nous soulager des "hagard, égarés, errant, apeurés et autres mal garés ;=)" tiens, me manque géhenne ?!
L'intro est intéressante dans le "fond", mais le choix d'un vocabulaire recherché donne un trop de lourdeur à la "forme" et c'est, à mon gout, dommage.

Le texte bascule à "j'ouvris une fenêtre" (je suis plus fan de Garcimore que de Majax ;=)
Sans connaissance préalable d'une partie de l'histoire, la forme m'aurait rebutée. Le niveau "rafiot" "lutins facétieux"... serait un bien meilleur écrin pour le cœur de l'intrigue.

 

Voilou, voilou... en tous cas l'émotion reste perceptible et c'est ce qui compte à mon goût.

Merci pour ce texte très personnel.

Pepito

 

PS : je confirme, lire à haute voix ou écouter un texte, est incompatible avec sa compréhension. Surtout après l'apéro...  ;=)

L’écriture est la science des ânes (adage populaire)

K-tas-strof
Portrait de K-tas-strof
La vie à la fenêtre

Texte très intéressant sur la fenêtre...

Bien écrit et représentatif d'un parcours qui nous concerne pour bcp, et plus qu'on ne saurait l’admettre.

Le fond est très profond, notamment entre préjugés : l'avis..... et réalité : la vie..... . Cela reste néanmoins la vie et ce qu'on veut bien s'accorder. Et l'avis, plus trivial devant son clavier, n'a de valeur que lorsque la fenêtre pousse à ouvrir la porte... souvent sur des déceptions.

La forme est cadrée, des fondations faites d'écorchures, une douleur constante pour abri..., des fenêtres et des portes pour laisser entrer mais aussi sortir... et des étapes, l'une après l'autre. Parfois, il fait bon de déménager ...

En ce qui me concerne, je rajoute des rideaux ;) mais les reflexions sont, quelque part, un peu les mêmes.

Il y aurait bien plus à dire mais je ne sais pas comment,  et préfère laisser la place aux autres.

 

Cependant, j'ai une réponse :

D'avoir été caillou un jour, passé par ta fenêtre, il n'a pas fallu longtemps pour que, du haut de l'état j'erre, immobile derrière toi et ta fenêtre à te regarder toujours la fixer, ton reflet et celui de ton passé.

 

A publier, je dirai OUI

K'adore ou K'pitule ... des fois :-)

Vous devez vous connecter pour poster des commentaires