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…dans la cargaison

 

je

            vous

                        ai épousée

du premier amour au dernier chagrin

            étiré jusqu'à ce jour où vous me lisez

            ce dortoir dans un toujours raboté

           

vous m'avez appris

                        comment

                        lorsque tout coule

                        engendrer

                        un peu moins

                        de fureur au monde

                        et comment

                        enclaver ma salive

                        l'épurer

                        dès sa crête

 

j'acte, j'aspire

je respire peu

je me suis toujours noyé

seulement là et de paroxysme

de vous

 

 

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Commentaires

jfmoods
Portrait de jfmoods
"Boucans XV" s'inscrit dans
"Boucans XV" s'inscrit dans un jeu d'intertextualité : celui de la traversée métaphorique d'un désert déjà évoquée, ailleurs, dans "Boucans XVII". L'expression "dans la cargaison" dresse devant le lecteur la perspective d'une vie humaine vouée aux aléas, telle une marchandise stockée dans la cale d'un bateau en partance vers un ailleurs inconnu. Le thème de l'eau se confirme à nouveau comme élément structurant du recueil "Qu'importe". Un double parallélisme ("je vous ai épousée"/"vous m'avez appris", "je suis"/ "de paroxysme de vous") signale une situation d'échange propre à celle d'un couple, mais matérialisant ici le rapport du locuteur à son lectorat, rapport marqué par une indéfectible fidélité de l'un envers l'autre (gradation hyperbolique : "du premier amour au dernier chagrin"). La périphrase ("ce dortoir dans un toujours raboté"), reprenant le groupe nominal ("ce jour"), met en lumière l'aridité d'un rapport au temps cloisonné entre sommeil imposé ("dortoir") et désertion de l'idéal (paradoxe : "un toujours raboté"). Quelques verbes à l'infinitif ("engendrer", "enclaver", "épurer") magnifient l'aspect formateur du travail d 'écriture ("comment" x 2, "appris"), cette capacité à ouvrir un espace poétique qui puisse fixer une haute ligne d'affects (expression : "dès sa crête") afin d'éclairer une perspective. Même si cet apport est largement insuffisant (comparatif d'infériorité : "un peu moins"), il représente un frein à la profusion d'émotions fuyantes (hyperbole : "tout coule"), à la sensation de frustration ("fureur au monde") qui traversent douloureusement l'individu. La périphrase ("ma salive"), qui figure l'écriture du locuteur, traduit bien le fait que les mots remplacent une parole qui ne parvient pas à s'échanger dans un rapport direct avec autrui, qu'elle doit passer par le truchement de la page, par le truchement de l'écrit pour trouver à se dire. C'est bien là que se situe toute la problématique du texte : plongé dans l'écrit, le locuteur est coupé du reste des humains (adverbe exprimant le manque : "je respire peu", autres adverbes marquant une présence inactive : "seulement là"). Écrire consiste à rendre compte ("j'acte"), à se projeter par le texte, tout entier et sans mesure ("paroxysme"), dans un après espéré ("j'aspire").  Ce n'est, en aucune manière, regagner à la nage la terre ferme de l'échange, se tenir debout, dans le temps vécu, en partage avec ses semblables (image exprimant la stagnation : "toujours noyé").

Merci pour ce partage !


RB
Portrait de RB
Boucan et pourquoi XV

Bonjour toutes et tous. Merci de vos lectures ! Je cours pas mal pour le moment mais vais me rattrapper dans les commentaires très vite, promis...

 

"Boucaner" : (Larousse) Exposer de la viande pour la faire sécher.

En fait, je m'étais également fourvoyé sur la définition de boucan. Comme dans le langage "commun" (y en a-t-il un ?) je l'avais utilisé comme beau mot pour synonyme de bruit.

J'ai donc écrit quelques textes autour de ce mot boucan=bruit.

Puis, après vérification, j'ai plutôt apprécié sa signification liée à la chaleur, à la torréfaction, à la sécheresse qui conserve, garde à la chose ses qualités mais avec ce goût boucané.

J'ai continué et en suis au dix-huitième... certains dans le sens "commun", d'autres dans le sens "correct"...

Écrire, c'est se tenir à côté de ce qui se tait
Jean-Louis Giovannoni - extraits de Pas japonais

jfmoods
Portrait de jfmoods
Boucan : ancêtre du barbecue.

Boucan : ancêtre du barbecue.

K-tas-strof
Portrait de K-tas-strof
Etrange sonorité

Je ne sais pas quoi penser de ce poème.

La première fois que je l'ai lu, il m'a fait l'effet d'un "au secouuuuurs".

Et puis aujourd'hui, il me murmure des mots doux. Hummm

Je suis convaincue qu'il y a des jours pour lire et d'autres pour faire du shopping.

Il fallait que je le dise. Que je dise que j'ai détesté ce que j'aime bien, après coups. En revanche, le boucan tel-que j'en sais, n'y est pas dans ce texte. Sans doute qu'on s'y habitue, de ces amours qui résonnent et font du bruit à rendre fou.

J'ai peur de le relire.....

K'adore ou K'pitule ... des fois :-)

brume
Portrait de brume
Bonjour RB

Le titre  Boucan XV m'est obscur et le poème ne semble pas me donner de réponse.

Peut-être le boucan intérieur, les émotions vives, mais je ne suis pas sûr, en sachant qu'il est suivi d'un chiffre romain cela reste donc pour moi énigmatique.

 

Il y a tout de même une forte émotion qui s'en dégage, bien que sur le fond j'ai peur d'être à côté, selon mon interprétation j'ai l'impression d'une acquisition de la sagesse pour l'autre et grâce à l'autre.

La forme ne me plaît pas du tout. Pour moi cela ne ressemble pas à une déconstruction, la déstructuration exprime un désordre intérieur ou psychologique ce qui ne semble pas être le cas ici. Je ne comprends pas l'interêt de cette forme, pour moi elle n'apporte pas grand chose.

 

Je suis désolée de ce commentaire pas très constructif mais cette lecture m'a fait poser trop de questions.

luluberlu
Portrait de luluberlu
Intrigué par le titre, j’ai

Intrigué par le titre, j’ai cliqué. Je me suis dit « tien ! il va poétiser sur le “rugby” (il doit bien avoir des poètes du rugby, non ?). Pis, ça m’a sauté aux yeux, un peu comme la maison toute de guingois qui se trouve à Lille. C’est tout de traviole tout déconstruit. Eh bé, boudiou, voilà, on a trouvé (en tout cas moi) le poète de la déconstruction ! Une réflexion entrainant l’autre, car il m’arrive d’en avoir plusieurs les unes à la suite des autres, j’ai pensé à Picasso. Et puis, non, c’est idiot. Ce qui engendre cet effet, c’est la présentation, la mise en page : elle est piégeuse.

Bon, tout ça, ça ne dit rien sur le poème. Alorsse (ce matin, j’ai l’esprit facétieux) :

1) Le titre : ça veut dire ? (Louis, au secours !).

2) Dans la cargaison : je n’arrive pas à savoir laquelle : celle des sentiments, ou celle dans laquelle se cache un passager clandestin, ou autre ?

3) le dortoir : s’agit-il de réminiscences adolescentes ? Si, oui, lesquelles ? J’aimerais bien en savoir un peu plus.

Malgré tout, et curieusement, ça marche. C’est une poésie. Et j’ai bien aimé.

 

 

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